Zoom sur Cultures contemporaines

Rencontre avec Mochélan : "J'écris pour être entendu"

Mochelan
Sous le signe de la musique de la langue avec un rappeur belge, des travailleurs sociaux et des bibliothécaires enthousiastes !

Date de publication de la page et auteur de publication

Créé le:

Retour sur une rencontre / atelier riche en échange et émotion

Après l’atelier d’écriture mené en 2016 avec la poétesse québécoise Denise Desautels, la Médiathèque départementale a invité en février 2017, le rappeur belge Mochélan qui chante avec émotion et mordant sa ville Charleroi. Après Bob Dylan, Prix Nobel 2016, nul doute que la chanson à textes peut se concevoir comme un genre littéraire à part entière. Le rap est une écriture contemporaine qu’il convient de comprendre et de questionner. A travers le regard de ce rappeur, on découvre une jeunesse qui se révolte contre le fatalisme et qui se débrouille plutôt que de baisser les bras. Son écriture introspective ouvre à l'altérité et est habitée par une force qui ne laisse pas indifférent : les mots, la tchatche, les rimes inspirées emportent le spectateur.

Ce stage a été conçu en partenariat avec Act’art. Mochélan accompagné aux claviers par Rémon Jr. s’est produit le 24 février 2017 à Bray-sur-Seine dans le cadre des Scènes rurales. « Nés Poumon Noir » est un spectacle plus qu’un simple concert de rap grâce à la vidéo, la mise en scène mais surtout grâce à la présence scénique de Mochélan, d’une intensité extraordinaire. Les stagiaires ont été invités à participer à ce spectacle en plus de la journée.

Mochélan a d’emblée raconté son parcours et a très vite demandé aux stagiaires de s’impliquer autour de jeux d’écriture suite à l’écoute d’une de ses chansons qu’il a dite sans musique. Les stagiaires amusés se sont volontiers prêtés au jeu qui a duré la journée dans un esprit de complicité et d’échange. Cette journée a permis aux 17 stagiaires dont une partie de travailleurs sociaux des MDS de Nemours, Provins, Tournan, Coulommiers, Montereau, de s’immerger dans l’univers de l’artiste et de s’initier à l’écriture.

Ecoutons ce que Mochélan leur a confié

Qui étiez-vous quand vous étiez jeune ?

  • J’ai beaucoup raté mes écoles (…), j’étais un merdeux mais un curieux du fond de la classe et au fond de la classe, les faits de société m’intéressaient. J’ai grandi en écoutant Brel, Brassens chez mes parents, Renaud. J’avais un attrait pour les textes et particulièrement pour le rap français dont IAM, un rap de textes. Jusqu’à 23 ans, j’étais con, je n’avais pas de culture. J’ai fait un voyage en Bolivie avec une caméra et ce voyage m’a transformé.

Quel est votre rapport à l’écriture ?

  • Quand j’ai commencé à écrire, j’écrivais pour extérioriser des choses, pas pour me produire. J’écris pour l’oralité, pour être entendu. (…). J’ai l’utopie de croire à quelque chose. La scène est un espace sacré, (…). Dire un texte, c’est de l’ordre du sacré, on sort du banal. L’écriture, c’est la nuance. Je travaille le champ lexical, l’esthétique vient ensuite.

Parlez-nous de la Belgique et de votre position en tant que rappeur belge ?

  • Il n’y pas de cités en Belgique, il y a plutôt des cités ouvrières dont celle dont je suis issu, des cités comme celles évoquées par le cinéaste Ken Loach. En Belgique, on n’a pas cette impression de ghetto comme en France. Les Belges et plus particulièrement les rappeurs belges n’ont pas de rapport académique avec la langue, ils ne se prennent pas au sérieux comme les rappeurs français. Les artistes belges sont sans doute plus libres dans leur rapport à la langue et donc très créatifs. N’étant pas au centre de l’univers comme en France, ils ont un esprit plus décalé. L’aspect politique est essentiel en Belgique, pays divisé.

Quel a été votre parcours ?

  • Avant d’être artiste, j’étais animateur socio-culturel. Mon seul diplôme, c’est le BAFA. Aujourd’hui je suis chanteur et j’anime des ateliers dans les écoles, les centres sociaux, ...  Je ne suis pas prof, l’écriture ne s’apprend pas. Je suis coach auditif ! J’ai renoué avec mon père au festival d’Avignon quand il est venu assister à mon spectacle pour lequel est j’ai été primé. Je m’intéresse aujourd’hui au cinéma. J’ai envie de faire des films.

Qu’est-ce qui est important pour les jeunes, selon vous ?

  • Il faut favoriser des pédagogies alternatives et les pratiques artistiques. Permettre aux jeunes de s’exprimer sur ce qu’ils connaissent, de renouer avec leur passé. Les souvenirs sont propices à la créativité (…) à partir d’eux, on tire un fil. Utiliser le numérique avec eux pour leur permettre de devenir « acteur » d’une pratique artistique.